« Nous avons créé le VIFFF à Vevey en écho à Chaplin »

Loïs de Goumoëns est cofondateur et codirecteur du Vevey International Funny Film Festival. La manifestation compte un jour de plus pour sa quatrième édition qui démarre jeudi. © David Trotta

La quatrième édition du Vevey International Funny Film Festival démarre jeudi à Vevey. Il se dédie corps et âme à la comédie, un genre en mal de reconnaissance selon Loïs de Goumoëns, codirecteur et cofondateur du VIFFF. Interview.

Loïs de Goumoëns, en quelques mots, qu’est-ce que le VIFFF ?

C’est un festival de films comiques qu’on n’a pas l’habitude de voir au cinéma, sur les écrans et que nous essayons de mettre en avant, en comparaison à de grosses comédies françaises ou américaines par exemple. Nous nous ouvrons évidemment à ces productions notamment pour les cérémonies d’ouverture et de clôture. Nous faisons toutefois le tour des festivals tout au long de l’année pour trouver des films du monde entier qui n’auraient aucune chance d’être montrés en Suisse. L’idée étant aussi de rester dans ce registre comique, puisqu’aucun festival ne lui est entièrement dédié.

Une variété de pays qui se retrouve dans votre programmation ?

Nous présentons des films de France, de Finlande, du Brésil, du Japon, des États-Unis, de Suisse, du Portugal, d’Allemagne pour vingt-quatre projections au total.

Le manque de valorisation du genre a beaucoup été pointé du doigt. Notamment en France et les polémiques autour des Césars qui ne prenaient que très peu en compte les comédies.

C’est un genre souvent dévalorisé. En tout cas peu mis en avant. Nous voulions aussi monter ce festival pour montrer qu’il n’est pas facile de faire une bonne comédie. Que ça demande beaucoup de travail. En étant une vitrine pour des choses qui tournent moins. La donne est en train de changer. On constate un retour vers des comédies assez légères. Mais de façon générale, le genre est peu valorisé. À Cannes par exemple, aucune comédie à proprement parler n’a remporté la Palme depuis les années 1970. Je pense que c’est lié à une sorte de construction sociale en place depuis longtemps, qui met en avant les choses graves et profondes. Ce qui est léger ou fait rire est plutôt laissé de côté.

Pourtant on peut faire passer des messages à travers le rire. Aussi bien sociétaux que politiques par exemple.

Chaplin en est un très bon exemple quand il tourne au ridicule la deuxième guerre mondiale et son principal dictateur. Au VIFFF, nous partons vraiment de ce principe qu’il y a plusieurs manières de dire les choses, de raconter des histoires. Nous projetterons À genoux les gars, une production sur les thématiques du viol et du harcèlement. Comme il a été tourné dans un genre comique, le résultat est très violent. Et c’est très intéressant. On rit alors que le film aborde des thèmes dramatiques.

Vous accueillez cette année Éric et Ramzy, qui ont survolé l’humour français pendant de nombreuses années, en invités d’honneur. Un gros coup ?

Oui. Ce qui est très intéressant, c’est qu’il y a un peu deux volets à leur filmographie. Une partie est composée de grosses comédies qui ne resteront pas forcément dans l’histoire, comme Les Dalton. Mais ils ont aussi créé un univers qui leur est propre, avec La Tour Montparnasse infernale ou la série H, par exemple. Une partie de la critique cinéma, comme les Cahiers du Cinéma, les adule depuis leurs débuts. Parce qu’ils ont été les seuls à proposer du burlesque. Que ce soit dans le visuel ou sur les mots. En comparaison à des comédies plus classiques, de situation. Ils ont vraiment fait un peu de tout. Et ils sont vraiment drôles, pour les avoir vus en interviews ou les avoir accueillis dans le cadre d’avant-premières. Que les gens apprécient ou non leurs films, personne n’arrive à se retenir de rire avec ce duo qui a clairement marqué la comédie française de ces vingt dernières années.

Le VIFFF est basé à Vevey, sur la Riviera. Sur un terreau qui semble particulièrement fertile du point de vue de l’humour.

Nous l’avons créé à Vevey en écho à Chaplin, pour nous inscrire dans cet héritage comique. Un festival de comédies existait déjà dans les années 1980 et 1990, dont la présidente d’honneur était Oona O’Neill, la femme de Charlie Chaplin. Et nous avons choisi Laura Chaplin, la petite-fille de Charlie Chaplin, comme présidente d’honneur. Nous sommes vraiment contents que quelque chose ait pu renaître et perdurer de cet héritage.

Un mot sur le jury ?

Il est composé de trois membres que sont Valérie Paccaud, animatrice et journaliste sur Couleur 3 que tout le monde connaît bien, Sandra Romy la directrice du Musée de l’Absurde de Vevey et réalisatrice de films d’animation et enfin Ron Carlson, un réalisateur américain dont le film Deat Ant sera projeté en nocturne. L’histoire d’un groupe de métal qui se retrouve au milieu du désert, commence à prendre des drogues et se fait attaquer par des fourmis géantes (rires). Les trois nocturnes tournent autour du rock’n’roll.

Quatrième édition cette année. Elle démarre jeudi. Tout semble bien se porter pour le VIFFF.

Tout se passe bien. Nous ouvrons d’ailleurs cette année le jeudi, ce qui nous fait un jour de festival supplémentaire. Mais comme n’importe quel projet culturel, le nerf de la guerre, ce sont les financements qui décideront de l’avenir du VIFFF. Et nous verrons aussi en fonction de la réponse du public au rendez-vous que nous lui proposons cette année encore.

En moyenne, combien de personnes ont fréquenté le VIFFF jusqu’à maintenant ?

Nous sommes passés de 1400 personnes la première année à 2400 l’an dernier.

Une augmentation que vous espérez voir se reproduire en 2018 ?

Nous préférons progresser lentement, mais sûrement. Nous serions très contents avec 2500 personnes.

David Trotta

vifff.ch/

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